Découvrez la nouvelle saison 21-22 du LICEU Opera Barcelona !

Quatre Mozart, dont la « trilogie Da Ponte » confiés à la même équipe, construisent l'ossature d'une saison couvrant quatre siècles d'opéras et d’œuvres lyriques, de Telemann à Britten, de Bellini à Berg. Sans oublier Verdi ou Tchaikovski.

Faut-il choisir dans cette galaxie de stars, de productions, d'événements? Alors, élisons les valeurs sûres, les opéras qui allient les promesses d'une distribution sans faille, d'une direction énergique et/ou sensible, d'une mise en scène efficace et respectueuse. Sans nous interdire des chemins plus audacieux, des expériences plus novatrices.

Mozart donc, et excusez du peu quatre Mozart ! Il est rarissime de voir à la suite la trilogie Da Ponte / Mozart au cours d'une même saison. A fortiori au cours du même mois, au cours de la même semaine. Les spectateurs qui le souhaitent pourront enchaîner dans l'ordre de leur composition en trois soirées successives Le Nozze di Figaro, Don Giovanni, Cosi fan tutte (du 7 au 27 avril 2022). Le même chef Marc Minkowski , le même dramaturge Ivan Alexandre, une équipe unique de concepteurs et de chanteurs assureront la continuité de cet ensemble. Pour avoir vu le troisième volet de ce triptyque, Cosi à Toulouse en septembre 2020, nous pouvons garantir la qualité théâtrale et esthétique d'une conception qui joue pleinement le jeu du théâtre, des tréteaux de La comedia del arte, dans un esprit très XVIII° siècle proche de Marivaux et de Laclos, de Da Ponte … et de Mozart. L'esprit, la subtilité, les vertiges de la séduction, du plaisir et de la musique sont au rendez-vous. Dans la distribution juvénilement internationale, on guettera les prestations d'Alexandre Duhamel (Don Giovanni et Don Alonso), Angela Bower (Suzanne, Zerline et Dorabella), Anna-Maria Labin (La Comtesse et Fiordiligi), Robert Gleadow (Figaro, Leporello et Guglielmo)...

Vous voulez plus de Mozart ? Le Liceu vous présente La Flûte enchantée sous la direction scénique de Simon McBurney et musicale de Gustavo Dudamel en personne. La magie et la flamme au service du dernier Mozart, le plus poétique, le plus gravement enfantin. D'une régulière double distribution,nous retiendrons pour la série des huit représentations l'Orateur unique à bien des égards de Matthias Goerne, et le Tamino exceptionnel de Javier Camarena en alternance avec un ténor français magnifique Julien Behr (juin/juillet 2022).

La nouvelle saison tisse une continuité avec la précédente : on retrouve le couple Josep Pons à la baguette, Katie Mitchell à la mise en scène, tous deux maîtres d’œuvre des récentes représentations (février/mars 2021) de Lessons in Love and Violence, le dernier opéra de George Benjamin. Les revoici pour diriger l'Ariadne auf Naxos de Strauss (du 27/09 au 04/10 2021), une des plus parfaites collaborations entre Hoffamnstall et Richard Strauss. On a vu cette production au festival d'Aix en Provence. Une réussite absolue de théâtre dans le théâtre intelligent, sachant marier le comique et le tragique, la fantaisie et le lyrisme. En Ariane Irène Theorin, fabuleuse Isolde sur ces mêmes planches. En alternance Johanni Van Oostrum dont la découverte dans un récent Freischutz a été pour nous l'émotion lyrique de l'année et, référence indiscutable,fut la partenaire de rêve de Jonas Kaufmann dans sa tournée Wien. La première succombera aux charmes toniques de Nikolai Schukoff, la seconde à ceux tout aussi triomphants de Brandon Jovanovich.

Dmitry Jurowski dirige une Dame de Pique de Tchaïkovski dans la mise en scène élégante de Gilbert Deflo. Deux ténors généreux Yusif Eyvazov et Martin Muehle se partagent le rôle d'Hermann et l'amour de Sondra Radvanovsky et Lianna Haroutounian. On salue la présence pour incarner la nostalgique et redoutable Comtesse de deux grandes dames du chant, Dolora Zajick et Elena Zaremba. Une distribution de haut vol pour un drame poignant sur un livret inspiré du poète Pouchkine (Du 26/01 au 11/02). Faut-il rappeler le génie dramatique de Tchaïkovski ?

Mozart, Tchaïkovski, Debussy. Voilà nos trois cartes de cœur. Le Liceu programme le chef d’œuvre français Pelléas et Mélisande dans une mise en scène signée Alex Ollé. A la baguette, Josep Pons dont on connaît les affinités avec la musique française. Le scénographe espagnol crée un espace mental empreint de rêve et de mystère. Le décor, les lumières participent à l'élaboration d'images qui empruntent à l'univers surréaliste sans que jamais le sens devienne obscur, sans que jamais la chose vue occulte la musique et les mots. Une osmose se crée et les personnages semblent errer à la recherche de l'autre, à la recherche d'eux-mêmes. Et c'est très fort, et c'est très beau. Une distribution de haut vol réunit les français, complices de longue date, Stanislas de Barbeyrac et Julie Fuchs dans le double rôle titre face au Golaud séduisant et inquiétant de Simon Keenlyside. Arkel aura la sagesse et la classe de Franz-Josef Selig. (Du 28/02 au 18/03 2022).

Une programmation ne se réduit pas à la simple juxtaposition de titres aussi prestigieux soient-ils ou à l'alignement de distributions, plus séduisantes les unes que les autres. On doit y trouver des lignes de force, un projet musical, une architecture qui jette même des passerelles sur les années à venir. C'est pleinement le cas à Barcelone.

Le rare Orphée de Telemann sera donné en version concert sous la direction de René Jacobs. Cette collaboration annonce une trilogie Orphée que compléteront dans les deux années suivantes Orphée et Eurydice de Gluck, et l'Orfeo de Monteverdi.

On peut suivre dans cette programmation un autre fil rouge qui conduit d'une œuvre à l'autre à travers la noble présence du grand baryton allemand Matthias Goerne. Orateur dans la Flûte enchantée, il sera un des protagonistes du War requiem de Britten, œuvre immense par son inscription historique, sa portée intemporelle et universelle sur un texte poétique de Wilfred Owen. Josep Pons dirige outre Matthias Goerne la soprano russe Tatiana Pavlovskaya et le ténor britannique Mark Padmore, retrouvant ainsi la configuration vocale multinationale qui devait présider à sa création. Le photographe et artiste visuel Wolfgang Tillmans proposera sa vision scénique de la grande messe profane de Britten. Matthias Goerne encore et toujours et avec quelle joie sera Wozzek, toujours dirigé par Josep Pons dans l'opéra sublime de Berg dans une direction scénique de William Kentridge / Luc de Wit dont la Lulu en 2015 a ébloui les spectateurs du Met (Du 22/05 au 04/06 2022). Et de Berg à Britten, chacun pourra tisser tous les liens qui s'imposent dans ces deux réflexions sur les guerres qui broient les individus et détruisent l'humanité dont chacun est pétri. L'Heldentenor allemand Torsten Kerl chantera le Tambour Maljor et Elena Zhidkova, la mezzo soprano russe, Marie.

Dans la programmation, Orphée, Ariane, Bacchus, Électre, Œdipe construisent un autre réseau, mythologique et musical. Un concert unique le 13/11/2021 rapproche deux œuvres, deux compositeurs, deux mythes. Josep Pons fait résonner les hautes voix de son Orchestre du Liceu pour une suite d'Elektra de Strauss et le grand oratorio de Stravinski Oedipus rex. Dans le rôle d'Oedipe Michael Spyres face à la Jocaste d'Ekaterina Gubanova. Un must.

L'opéra italien est représenté par deux productions qui devraient attirer les foules, tant les distributions s'annoncent prometteuses. Une reprise bienvenue d'abord.. Rigoletto de Verdi accueille les ducs de Mantoue de Benjamin Bernheim dont la prestation exceptionnelle de puissance, de lyrisme, de nuances a sauvé du naufrage tout récemment le Faust de Bastille ou Saimir Pirgu dont on aime suivre depuis des prestations au Capitole de Toulouse la rayonnante carrière. Christopher Maltman, dont le Don Giovanni blessé est dans toutes les mémoires et Markus Brück qui sait dans toutes ses prestations allier noirceur et tendresse, violence et générosité auront des élans de père pour Olga Peretyatko ou Aigul Khismatullin. Dans la fosse, la présence de Daniele Callegari garantit l'italianità de ce Rigoletto que met en scène en rouge et noir dans une vision à la fois épurée et tragique la sobre et efficace Monique Wagemakers. (Du 28/11 au 19/12 2022)

En 2016, Alex Ollé deux fois présent cette année a mis en scène à Londres (ROH) Norma de Bellini : c'était un spectacle grandiose. La production est programmée pour clore la saison avec dans le rôle de la druidesse Marina Rebeka. Sa Norma est dans le cœur et les souvenirs de tous les mélomanes qui ont eu la chance de l'applaudir. Voix somptueuse, technique exemplaire, port de reine font vivre et vibrer l'intériorité du personnage, la fureur de l'amante outragée, la compassion, l'héroïsme du sacrifice. Du très grand art. Onze représentations début juillet 2022 qui feront entendre dans un silence religieux les Casta diva de deux autres grandes divas, Marta Mathéu et Sonya Yoncheva qui avaient étrenné triomphalement la production à Londres. Le solide Paolo Fanale et le jeune et ardent Airam Hernández en qui nous croyons beaucoup pour l'avoir entendu trois fois seront leurs Pollione : ils auront su conquérir aussi les cœurs des Adalgises de Varduhi Abrahamian et de Teresa Iervollino dont on attend beaucoup. Domingo Hindoyan animera dans la fosse une partition dont l’envoûtement le dispute à la force d’entraînement.

Et nous n'oublierons pas les récitals de Piotr Beczala (03/02/2022), de Sonya Yoncheva (le 30/04/2022), de Magdalena Koscena (le 29/06/2022) et pour célébrer les 175 ans de l'institution de Barcelone le 03/04/2022 un gala exceptionnel avec Anna Netrebko. Bel anniversaire, le Liceu !

JJ